édito 24-25

PROMENONS-NOUS DANS LES BOIS

C’est l’histoire de deux frères Michel 4 ans et Patrice son aîné qui, au début des années 50, se sont réfugiés et ont grandi dans un bois. Michel raconte qu’ils vont tout de suite ne pas avoir peur et s’y sentir comme chez eux. En forêt, les sens stimulés par les odeurs et les bruits, arpentant un sol accidenté, pierreux ou moussu, à la fraîcheur de l’ombre ou dans un rai de soleil dardant à travers les feuilles, goûtant les baies, humant les champignons, actionnant le frou-frou des fougères à chaque passage, les enfants puisent dans une immense source d’imagination et explorent un terrain de jeu sans équivalent. Ici, aussi, sans le savoir, ils s’imprègnent des nombreux modèles de coopération que la nature a mis en place. Ils font l’expérience de l’altérité, entrent dans cette merveilleuse équation de la relation, cet « 1 + 1 qui font 2 », ils jouent au « nous », leurs âmes « frèrent » et « soeurent ». Les artistes savent mieux que quiconque renouer avec les états d’enfance, ils nous prêtent leurs yeux pour voir ce que nous ne voyons plus : la puissance du jeu, la recherche nécessaire d’un absolu idéal et la beauté cachée du chaos. Dans cette saison 24/25, la question de la relation est présente dans chaque spectacle, comme un oracle : des duos et des couples, des enfants et leurs parents, des frères et soeurs, des amis, des amours, ce qui les lie, les délie et relie. À La Mégisserie, nous nous armons d’interactions, nous mobilisons l’action collective pour nous frayer un chemin. Nous invitons des jeunes gens à s’inventer un festival, nous réunissons « tout un village » pour élever nos enfants à l’occasion de chaque Samedi en famille, nous accrochons des guirlandes de lucioles pour figurer les étoiles, nous discutons après chaque représentation. Ici l’on sait, peut-être mieux qu’ailleurs, ce que prendre le maquis veut dire, alors viens, promenons-nous dans des bois enchantés, le loup on s’en fiche contre lui nous serons deux.

Laetitia Delpech